ccdr_01_01Le bulletin de l'AMICO ouvre une rubrique de remise à. niveau des connaissances de ses lecteurs en matière de routes. Encore un recyclage ! dira-t'on.... Mieux que cela puisque nous ne parlerons pas seulement des vélos et des tricycles, mais aussi des voitures et des camions. "Réautomobilage" ou même "Repoidslourdage" conviendraient donc mieux.

Pourquoi cette rubrique ? C'est que nous avons relevé beaucoup de défaillances chez les Anciens de Colas. A se demander ce qu'ils ont fait pendant dix ans (au moins: relire nos excellents statuts) à l'ombre du losange !

Exemple ceux qui ont de la religion continuent à dire que "les voies du Seigneur sont impénétrables", alors qu'il existe depuis longtemps des faucheuses tondeuses-tronçonneuses-découpeuses-arracheuses auxquelles rien ne résiste! A l'inverse, ceux qui n'ont pas de religion, donc pas de morale, prennent la route, sans vergogne (au mieux, ils l'empruntent), sans aucune intention de la rendre, ce qui est très dommageable pour le réseau routier qui s'amenuise d'année en année.

Notre rubrique aura un autre intérêt, celui de faire naitre des réflexions qui seront d'un grand profit pour les responsables de tout poil (et plume) de la conception, de la construction et de l'entretien des routes. Mort aux idées archaïques ! Sus aux moyens moyen-âgeux ! du nouveau ! encore du nouveau ! toujours du nouveau !

Pour vous montrer ce que nous pouvons faire, voici, en matière d'introduction un projet de Adrien TRESTOUR

(un orfèvre, puisqu'il a été longtemps l'un des principaux responsables de la technique chez Colas, à Bonneuil, à Trappes, au Siège). Modestement, il baptise son projet N.T.R.R. (Nouvelle Technique Routière Révolutionnaire). Nous lui laissons la parole :

ccdr_01_02"Il s'agit d'un procédé utilisant LE FROID dans la construction routière.. Ce n'est pas une invention à sensation, il suffit d'appliquer à la route la technique bien connue de construction et d'entretien des patinoires. En résumé, la construction de la route consisterait à :

1) Réaliser des bordures parallèles, d'écartement et de hauteur déterminés en fonction de l'importance de la circulation et de la nature du sol,

2) Poser sur le sol de base le système classique de réfrigération,

3) Remplir de graviers, de granulométrie étudiée en fonction de la qualité de surface de roulement désirée (on utilise, pour ce faire, un engin du type gravillonneur muni d'une lame de règlage et roulant sur les bordures),

4) Remplir d'eau les vides du gravier jusqu'à un niveau qui laisse apparaitre les crêtes des graviers (la nature et la propreté de l'eau n'ont aucune importance)."

N.D.L.R. - Nous nous permettons de dire à A.T. (pas "amortissements techniques" mais "A. Trestour"; il n'est d'ailleurs pas près d'être amorti, il suffit de lire...) qu'ayant essayé, il nous a semblé que l'eau de fleur d'oranger convenait mieux que l'eau de vaisselle; les Allemands auraient aussi utilisé avec succès l'eau de la région de Cologne...

"5) Mettre immédiatement en route le système de réfrigération. En quelques heures la route peut être mise en circulation.

Seul inconvénient majeur : les grèves de l'E.D.F., qui entraineraient obligatoirement la mise en place de barrièress de dégel.

Cette technique permet de réaliser toutes surfaces de la piste d'aviation à l'allée de jardin; dans ce dernier cas, on peut utiliser son propre congélateur.

Cette technique ne faisant appel qu'à des produits français, on imagine facilement tous les avantages qui en découlent aux niveaux (à bulle) technique, financier, commercial, etc....

Il est possible qu'un concours soit ouvert au public; un prix serait attribué à la personne énumérant le plus grand nombre d'avantages à cette technique : une cure thermale dans une station de son choix."

ccdr_01_03De telles contributions directes à l'amélioration des réseaux routiers, nous sommes persuadés que vous avez tous envie d'en apporter. Ne vous gênez pas : nous attendons vos écrits.

Pour animer et diriger notre rubrique de recyclage, nous avons fait appel au célèbre professeur Emile BORNE, licencié économique et technique es-matière considérée, ancien agent-voyeur ayant beaucoup observé, ingénieur routier de grand renom, en quelque sorte champion de voies et artères.

Voici, en version originale et non expurgée le cours aussi court que complet du professeur Emile BORNE :

" Mes chers amis, comme vous brûlez d'envie de démarrer sur les chapeaux de roue, je n'irai pas par quatre chemins. Je commence immédiatement par le premier chapitre; je l'intitule : une ROUTE, qu'est-ce ? A quoi sert-ce ? Je passerai en revue :

- Les caractéristiques géométriques (une route n'a pas de caractèristique algébriques, personne ne sait exactement pourquoi). Ce sous-chapitre comprend le tracé en plan, avec de remarquables remarques sur les carrefours et les tunnels ; le profil en long, le profil en travers (vous verrez qu'on peut profiler à la russe, mais on peut aussi profiler à l'anglaise, en douce, la quenouille, un mauvais coton, etc..).

- La constitution de la chaussée, faisant l'objet de textes de l'an III, de 1875, de 1958, etc... : une chaussée doit avoir une bonne constitution ; elle ne doit jamais être construite anticonstitutionnellement.

Si vous me le demandez gentiment et avec insistance, le premier chapitre sera suivi de plusieurs autres. Je pense déjà (et je vous vois frémir d'avance) à :

- Une route, çà se fait comment et avec quoi ? - Cà se fait comment et avec qui ?

et puis (mais à partir de là je serai obligé d'augmenter légèrement mes honoraires, car les matières seront plus difficiles et je prendrai des risques) :

- Notions de financement, de sécurité (points noirs), aperçus politiques (rouler à gauche ou à droite ?), psychologiques (la route chez Freud, psychoses du mec au volant), artistiques (la route dans la chanson, dans la peinture), sociaux, etc...

Quand le sujet sera épuisé, je pense que vous serez loin de l'être. Alors, nous aviserons...

ccdr_01_04A - UNE ROUTE, QU'EST-CE ? A QUOI SERT-CE ?

1°) Caractéristiques qéomètriques

a) Tracé en plan

Une route, c'est un ouvrage qui permet, sans s'embêter dans un train ou un avion, d'aller d'un point A à un point B. A est le plus souvent différent de B (A ± B). Si A = B,

- soit l'ensemble est vide, la route aussi puisqu'il n'y a pas de route, et je me demande ce que je fais là,

ccdr_01_05- soit l'ensemble, appelé alors "du serpent qui se mord la queue", contient une infinité d'éléments; Dans ce cas la route n'a pour objet que de faire vivre les marchands de super, ou de calmer ceux qui ont besoin d'aller faire un tour.

 ccdr_01_06Pour aller de A à B, la route peut être une droite : c'est le cas banal et plutôt monotone. Elle peut aussi s'infléchir pour passer par C (où habite un maire ou un gros conseiller général ami du gouvernement en place, ayant beaucoup à faire en A, en B; déplacements pour motifs professionnels, politiques ou sentimentaux).

ccdr_01_07La route peut aussi s'infléchir pour éviter une montagne ; c'est bien, mais c'est un peu une dérobade. Cà ne vaut pas un passage en tranchée ou en tunnel.

L'avantage de la tranchée, c'est qu'elle peut servir en cas de guerre de 14.

ccdr_01_08Mais si la région est infestée de Mohicans ou d'Apalaches, il vaut mieux choisir le tunnel.

(Nous aborderons la prochaine fois l'intéressante question des tunnels).

La route peut aussi s'infléchir pour éviter une ville encombrée : elle devient alors "déviation";

ccdr_01_09la déviation (ou rocade, ou contournement) permet de faire autant de fois que l'on veut le tour de la ville en admirant de loin les clochers de la cathédrale, avec pour seul inconvénient, le torticolis du conducteur. (Je demande un peu de silence au petit plaisantin du fond qui vient de faire remarquer que, contre un encombrement, un lavement doit être plus efficace qu'une déviation de colonne vertébrale. Je demande aussi du calme de la part de celui qui vient de dire que ma dernière phrase était plutôt trop longue).

ccdr_01_10Tout ceci étant, il faut dire que si en France tant de routes tournillent et tournicotent en innombrables virages pittoresques, c'est qu'elles suivent tout simplement le tracé des chemins de la Gaule ou du Moyen.Age; ces chemins contournaient des propriétés très morcelées dont les contours étaient définis à l'amiable.

Mais je m'aperçois que c'est l'heure. Sortez en ordre. La prochaine fois : les carrefours, croisements et autres pièges à conséquences imprévisibles; puis les passages en souterrains.

Mes chers amis, je vous remercie."

N.B. Les propos du Professeur Emile BORNE ont été recueillis par Jean LEVEQUE.